Crans-Montana / Wildstrubel – 113km / 6 600D+
La montagne c’est
comme un marathon : ça se respecte !
Objectif de l’année : un ultra dans les Alpes suisses
Ça sera notre 4ème plus grosse course (après la
TDS, l’UTMB et la Diagonale des fous).
Malgré l’expérience, chaque course est une leçon ! Et
je vais en prendre une belle…
Le profil de la course est une succession 4 grosses ascensions
à plus de 2 200m d’altitude (950, 1 100, 1 250 et 1 800D+) et la même chose en
descente :
L’appli « LiveTrail » est vraiment bien
fait : en fonction du « ranking » on a une projection /
estimation de notre temps de course (soit 26h pour nous) et puis il ajuste en
fonction des temps de passage et réestime pour les checkpoints suivants !
Cela nous permet essentiellementde nous projeter sur la
durée des ascensions.
Officiellement, notre objectif est de faire sous les 25h,
officieusement sous les 24h…
La météo est avec nous : température minimale de 10°C à
2 000m d’altitude et 25°C au plus chaud à 1 500m ! Le top 😊
Le départ est donné à 22h20 (dans le dernier sas, faute de
course et donc de points…), sous une belle nuit étoilée et nous partons à 4
avec pour objectif de courir ensemble au moins jusqu’au 23ème.
Puis la 1ère ascension me surprend : elle
n’est pas si « facile » que ça mais c’est censé être la moins
raide ! Elles sont comment les autres ???
23ème kilo : 705ème, 2h10 de
course
Le 1er copain saute au 23ème,
vomissements, nausées…
On repart à 3 et je n’arrive toujours pas à me réveiller !
Pour la 1ère fois de ma vie, je m’endors en
marchant et par 2 fois. Incroyable sensation ! On marche en file indienne,
je fixe le sol et paf je me tape un arbre ! J’ai fait un tout droit, je
suis sorti du sentier sans m’en rendre compte… Idem quelques minutes plus tard
sauf que c’est mon pote qui m’interpelle et me ramène sur le chemin !
Je flippe un peu car on est sur du faux plat montant, je ne
risque pas grand-chose mais va vraiment falloir que je me réveille car en
altitude les risques sont bien plus grands !
Cette sensation de paupières lourdes, de lutter contre la
fatigue me soûle car ce n’est que la 1ère nuit, le début de la
course ! Je ne comprends pas et je m’interroge toujours…
Bon, je profite de la magie des frontales, ce serpentin lumineux
qui évolue lentement et pour le moment sûrement.
44ème kilo : 664ème, 7h19 de
course
Comme par magie, mon corps se réveille au rythme du levée de
soleil ! Ça fait trop du bien… Enfin je me sens en forme !
Le paysage se livre à nous.
On a fait la moitié mais pas le plus dur !
On se donne 1h max au ravito pour se changer intégralement,
manger et faire le point. J’ai les
cuisses complétement saturées, je suis cramé…
Mes potes ne sont guère mieux que moi. Le 3ème équipier
décide de rester un peu plus pour dormir.
On se retrouve à 2, comme d’habitude et on décide de continuer,
step by step, à l’expérience, au mental…
On remballe vite fait et on repart sans trop réfléchir,
parce que trop cogiter ce n’est pas bon !
Je ne lui avoue pas mais je n’ai aucun doute : je ne me
vois pas la finir ! Pffff…
Dans ma tête je sais que je vais exploser mais je me fixe
comme objectif de l’accompagner le plus loin possible !
On n’évolue pas trop mal et on avale les 2 bosses en
profitant au maximum du paysage. Car il faut bien admettre que l’environnement
est magnifique : les montagnes, les plaines mouchetées de chalets en
contrebas, le ciel bleu. C’est d’un calme et d’une paisibilité…
Nous voilà au pied de la dernière ascension : 10km pour
1 800D+ et je suis encore vivant 😊
Un 1ER tiers dans la forêt avec quelques bons
pourcentages mais ça passe d’autant plus qu’il y a de quoi s’en mettre plein
les yeux !
Le dernier tiers est dré dans le pentu et je ne vois jamais
le point culminant. C’est usant, déprimant…
J’ai la tête qui tourne, je commence à voir quelques
étoiles. Je suis obligé de faire des pauses de quelques secondes pour récupérer
mon cœur et soulager les cuisses… C’est encore plus interminable… Le dernier
truc auquel je m’accroche c’est l’estimation que nous donne LiveTrail, à savoir
2h50 de grimpette.
Finalement, on atteint le sommet au bout de 2h30 et il fait
encore jour… Petite satisfaction…
93ème kilo : 529ème et 20h16
de course
On s’équipe vite fait pour la redescente et la nuit mais je
suis vraiment à bout de force.
Purée, 30 bornes de descente !
La 1ère partie de la descente est du même acabit
que la montée : raide et caillouteuse ! C’est bien technique mais
cela m’oblige à me concentrer, à penser à autre chose que la fatigue. On arrive
quand même à bien trottiner car la descente me coûte moins en énergie que la
montée.
Plus que 20km… Cela fait bien longtemps qu’on ne se parle
plus trop, la nuit est tombée et le halo de la frontale me met d’un état hypnotique :
c’est reparti, je suis dans un état second, les yeux tombent…
Je n’ai pas beaucoup de souvenirs des 15 derniers kilomètres
à part un sentier en faux plat descendant, plutôt roulant… On alterne marche
rapide / trottinement.
Pour la fois de ma vie en course et la 2ème fois sur
cette course j’ai des absences, des trous, mon cerveau se met en « off »
et se remet en « on » sans savoir combien de temps j’ai été en « off »…
Un manque total de lucidité, vraiment flippant !
Heureusement que mon pote est derrière et me surveille…
L’arrivée en 24h19 et 499ème
Je pensais avoir fait le nécessaire avec :
-
Un entraînement régulier : des semaines de
4-5 entraînements
-
Du spécifique (D+ et renfo) et des fractionnés
au seuil
-
Du volume : des sorties longues de plus 3h
bien vallonnées
-
Une bonne
course de prépa dans le Massif Central (70km pour 3 300D+) qui nous a bien mis
en confiance
-
Un dernier mois à vivre comme un mormon :
pas d’alcool, pas de soirée, pas d’apéro et au lit à 23h max !
Mais force est de constater qu’il nous a manqué :
-
De vraies sorties en montagne, en situation
réelle, avec de lonues ascensions sur de forts pourcentages (la sortie de 50D+
en mode hamster c’est bien mais cela a ses limites)
-
On n’a pas assez appréhendé l’exigence de ce
type de course en montagne, on ne s’est pas assez projeté mentalement. On est
parti « la fleur au fusil », fort de notre expérience et confiant de
notre prépa physique…
Mais bon, on l’a fait et je retiens :
-
Que pour une fois j’ai fait preuve de mental
-
Que l’expérience ne suffit pas
-
Qu’il n’y a rien de plus sympa que courir avec
des potes !
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