mardi 23 septembre 2025

Crans Montana - par Sam - 21/09/25

 Crans-Montana / Wildstrubel – 113km / 6 600D+

La montagne c’est comme un marathon : ça se respecte !

Objectif de l’année : un ultra dans les Alpes suisses

Ça sera notre 4ème plus grosse course (après la TDS, l’UTMB et la Diagonale des fous).

Malgré l’expérience, chaque course est une leçon ! Et je vais en prendre une belle…

Le profil de la course est une succession 4 grosses ascensions à plus de 2 200m d’altitude (950, 1 100, 1 250 et 1 800D+) et la même chose en descente :



L’appli « LiveTrail » est vraiment bien fait : en fonction du « ranking » on a une projection / estimation de notre temps de course (soit 26h pour nous) et puis il ajuste en fonction des temps de passage et réestime pour les checkpoints suivants !

Cela nous permet essentiellementde nous projeter sur la durée des ascensions.

Officiellement, notre objectif est de faire sous les 25h, officieusement sous les 24h…

La météo est avec nous : température minimale de 10°C à 2 000m d’altitude et 25°C au plus chaud à 1 500m ! Le top 😊

Le départ est donné à 22h20 (dans le dernier sas, faute de course et donc de points…), sous une belle nuit étoilée et nous partons à 4 avec pour objectif de courir ensemble au moins jusqu’au 23ème.


Tout d’abord j’ai du mal à garder les yeux ouverts, j’ai les paupières lourdes ! Mais bon, ce n’est pas ma 1ère nuit blanche en course, ça va passer…

Puis la 1ère ascension me surprend : elle n’est pas si « facile » que ça mais c’est censé être la moins raide ! Elles sont comment les autres ???

23ème kilo : 705ème, 2h10 de course

Le 1er copain saute au 23ème, vomissements, nausées…

On repart à 3 et je n’arrive toujours pas à me réveiller !

Pour la 1ère fois de ma vie, je m’endors en marchant et par 2 fois. Incroyable sensation ! On marche en file indienne, je fixe le sol et paf je me tape un arbre ! J’ai fait un tout droit, je suis sorti du sentier sans m’en rendre compte… Idem quelques minutes plus tard sauf que c’est mon pote qui m’interpelle et me ramène sur le chemin !

Je flippe un peu car on est sur du faux plat montant, je ne risque pas grand-chose mais va vraiment falloir que je me réveille car en altitude les risques sont bien plus grands !

Cette sensation de paupières lourdes, de lutter contre la fatigue me soûle car ce n’est que la 1ère nuit, le début de la course ! Je ne comprends pas et je m’interroge toujours…

Bon, je profite de la magie des frontales, ce serpentin lumineux qui évolue lentement et pour le moment sûrement.




La 2nde ascension est raide comme prévue, mais la nuit nous occulte un peu les difficultés et je met un peu de rythme, être actif pour ne pas m’endormir, du coup on la gravit, et peut-être un peu trop vite ! 1 100D+ en 1h15…

44ème kilo : 664ème, 7h19 de course

Comme par magie, mon corps se réveille au rythme du levée de soleil ! Ça fait trop du bien… Enfin je me sens en forme !

Le paysage se livre à nous.




La 3ème ascension me met une claque : c’est long, c’est raide, il faut vraiment pousser sur les cuisses mais surtout on ne voit jamais le point de bascule !




60ème kilo : 623ème, 11h19 de course

On a fait la moitié mais pas le plus dur !

On se donne 1h max au ravito pour se changer intégralement, manger et faire le point.  J’ai les cuisses complétement saturées, je suis cramé…

Mes potes ne sont guère mieux que moi. Le 3ème équipier décide de rester un peu plus pour dormir.

On se retrouve à 2, comme d’habitude et on décide de continuer, step by step, à l’expérience, au mental…

On remballe vite fait et on repart sans trop réfléchir, parce que trop cogiter ce n’est pas bon !

Je ne lui avoue pas mais je n’ai aucun doute : je ne me vois pas la finir ! Pffff…

Dans ma tête je sais que je vais exploser mais je me fixe comme objectif de l’accompagner le plus loin possible !

On n’évolue pas trop mal et on avale les 2 bosses en profitant au maximum du paysage. Car il faut bien admettre que l’environnement est magnifique : les montagnes, les plaines mouchetées de chalets en contrebas, le ciel bleu. C’est d’un calme et d’une paisibilité…




80ème kilo : 568ème, 15h36 de course

Nous voilà au pied de la dernière ascension : 10km pour 1 800D+ et je suis encore vivant 😊

Un 1ER tiers dans la forêt avec quelques bons pourcentages mais ça passe d’autant plus qu’il y a de quoi s’en mettre plein les yeux !


Un 2nd tiers à gravir dans la rocaille et perrier, sous les falaises. C’est long, je suis de plus en plus lent, l’altitude ne m’aide pas, je peine à respirer… Je plonge ma tête dans les fesses de la personne devant moi et m’accroche comme un tic ! Oui, je sais quand je suis bien fatigué je peux être « un peu » vulgaire et je m’en fous !




Je suis à la ramasse !

Le dernier tiers est dré dans le pentu et je ne vois jamais le point culminant. C’est usant, déprimant…

J’ai la tête qui tourne, je commence à voir quelques étoiles. Je suis obligé de faire des pauses de quelques secondes pour récupérer mon cœur et soulager les cuisses… C’est encore plus interminable… Le dernier truc auquel je m’accroche c’est l’estimation que nous donne LiveTrail, à savoir 2h50 de grimpette.

Finalement, on atteint le sommet au bout de 2h30 et il fait encore jour… Petite satisfaction…

93ème kilo : 529ème et 20h16 de course

On s’équipe vite fait pour la redescente et la nuit mais je suis vraiment à bout de force.

Purée, 30 bornes de descente !

La 1ère partie de la descente est du même acabit que la montée : raide et caillouteuse ! C’est bien technique mais cela m’oblige à me concentrer, à penser à autre chose que la fatigue. On arrive quand même à bien trottiner car la descente me coûte moins en énergie que la montée.

Plus que 20km… Cela fait bien longtemps qu’on ne se parle plus trop, la nuit est tombée et le halo de la frontale me met d’un état hypnotique : c’est reparti, je suis dans un état second, les yeux tombent…

Je n’ai pas beaucoup de souvenirs des 15 derniers kilomètres à part un sentier en faux plat descendant, plutôt roulant… On alterne marche rapide / trottinement.

Pour la fois de ma vie en course et la 2ème fois sur cette course j’ai des absences, des trous, mon cerveau se met en « off » et se remet en « on » sans savoir combien de temps j’ai été en « off »… Un manque total de lucidité, vraiment flippant !

Heureusement que mon pote est derrière et me surveille…

L’arrivée en 24h19 et 499ème


On était 1 100 au départ, 300 abandons mais le plus surprenant est le fait de gagner régulièrement des places malgré mon explosion…

Je pensais avoir fait le nécessaire avec :

-          Un entraînement régulier : des semaines de 4-5 entraînements

-          Du spécifique (D+ et renfo) et des fractionnés au seuil

-          Du volume : des sorties longues de plus 3h bien vallonnées

-           Une bonne course de prépa dans le Massif Central (70km pour 3 300D+) qui nous a bien mis en confiance

-          Un dernier mois à vivre comme un mormon : pas d’alcool, pas de soirée, pas d’apéro et au lit à 23h max !

Mais force est de constater qu’il nous a manqué :

-          De vraies sorties en montagne, en situation réelle, avec de lonues ascensions sur de forts pourcentages (la sortie de 50D+ en mode hamster c’est bien mais cela a ses limites)

-          On n’a pas assez appréhendé l’exigence de ce type de course en montagne, on ne s’est pas assez projeté mentalement. On est parti « la fleur au fusil », fort de notre expérience et confiant de notre prépa physique…

Mais bon, on l’a fait et je retiens :

-          Que pour une fois j’ai fait preuve de mental

-          Que l’expérience ne suffit pas

-          Qu’il n’y a rien de plus sympa que courir avec des potes !

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire